poésie

Avis de recherche d'inspiration

Je lui ai dit, en hachant mes paroles que nous devions manger pour le souper : « Trois rossignols ne peuvent me donner le bonheur. » Et le regardant bien en face : « Si je remplis la maison de rires tu sais ces beaux rires près de la route qui conduit à la forêt vas-tu me serrer la main ? » II a dit : « Oui. »

Thérèse Renaud, Les Sables du rêve, 1946

 


Ces voyages sont aussi dans le nombre l'exceptionnelle occasion d'un réveil.


Des perles incontrôlables suintent hors des murs.


L'inviable s'infiltre partout.


Le règne de la peur multiforme est terminé.


 


Un nouvel espoir collectif naitra.


Nos passions façonnent spontanément, imprévisiblement, nécessairement le futur.


 


Nous poursuivrons dans la joie notre sauvage besoin de libération.

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L'actualité
C'est le ici et maintenant
Quoiqu'il arrive de l'autre côté
des océans
Le soleil continuera de se lever
Sur son séant

Je cherche les papillons

Je cherche les papillons

Ils cherchent la guerre

Je pourchasse les miracles

Ils pourchassent les imprécisions

J’exécute les folies

Ils traquent des vies

J’accumule les rêveries

Ils multiplient les tueries

Je vois ailleurs

Ils n’envoient que des leurres

Ils ne sont que malheurs

Je cours les papillons

Je mange des macarons

En même temps

L'idée lui tord l'intérieur. Merveilleuse et impossible.
Un chat, attiré par la fable, s'est usé les griffes en vain.

C'est introspectif comme thème.

Pourtant il lui semble que la lumière ventile encore un espoir sucré. Miroiter que l'omniprésence soit enviable... Il n'est pas certain.

Mes images s'effacent au profit des mots et se faufilent, entraînant l'alphabet dans leur course. Le paysage défile, indémêlable.

Alors il décrirait les rêves éveillés.
Chapeau! Il n'a pas de bottes de sept lieues mais un chapeau oui. Et le coiffer est une invitation au voyage.

Promenade en vis à vis.
Deux regards sur un paysage de reflets.
Dedans, dehors. En même temps.

Dedans
Paysage de fourmis au soleil. Craquante agitation de croque-mitaines en costume d'hiver et de marbrures. Pavés mouvants, lézardes en ascension constante vers la sainte coque, le béton concave d'une arche de Noé qui ne se sauve plus qu'en rêve.

Dehors
Les grues, drapeaux en poupe, se livrent des duels essoufflants tout le temps d'un tour de soleil.

Ici
Dans leur course folle, des tortues enivrées se retrouvent sur le dos, incapables du moindre mouvement. Incapables!

Là-bas
C'est un sillon noir que l'on trace sur la neige. Blessure salée du bitume en hiver.

Encore
Je m'endors sur mon cahier, alors que des murs blancs s'effondrent en gris. Des taches dans les yeux, indélébiles, invisibles pour l'autre coté. Un jour je rêve sans dormir, mais ce n'est pas vrai, ce n'est jamais vrai. Ce n'est pas moi qui meurs, ce sont toujours les autres.

Ailleurs
Le temps de l'œuf. La marche militaire. Tu rêves. Il claque des portes à ta fenêtre. Quatre. Étang de cris au crépuscule du chaloupé. Le rythme se balance au bout d'une corde de grillons.
Sentimentale. Tu souffles une brise de jasmin pour que l'écho du voyage te suive jusque dans les plis d'un autre sommeil. Te survive, la soie de la nuit.

Assez
C'est étourdissant. Tant d'incohérence, j'ai mal au cœur.
Soyons sérieux et comptons. Les flocons par bourrasques, les efforts par pelletées et nos pas dans la forêt. Au bord de l'autoroute, l'horizon bleu des érables sous solutés n'inspire pas confiance. L'attraction est ailleurs, les accidents se succèdent pour le plaisir des voyeurs. Au gré des glissades, le long ruban rouge s'anime ou s'arrête. Il fera bientôt noir sur ses berges blanches, et nous jouerons encore le jeu. 

Sur le bord du gouffre

Sur le bord du gouffre où son souffle

M’engouffre je souffre

Toiles d’araignées qui me font saigner

Village déserté, hôtel abandonné

Je rêve de grands paysages éblouissants

Je deviens un accélérant électrisant

Lancer toute voile dehors, sur la Côte-d’Or

Dans mes éclats scintillants de conquistadors

Je cherche les cœurs de theclas nématiques

Qui hantent moqueurs, mon sombre manoir élastique

Pour me réjouir des encombres des esprits diaboliques

Pour fuir les Algonquins, qui m’ensorcellent coquins

Je m’établis alors taquin, dans un lit à baldaquin

Ayant bu trop de breuvage du malin

Ma parole se perd en vrillage manichéen

Que maintenant m’habite cette lointaine symphonie

Faite de reconduite de mes rêveries d’étourdi

Parcourez-vous le village pour vaincre le décalage?

Suivrez-vous mon sillage ou plutôt son mirage?

92 premières neiges

Le soleil de nuit caressait mes joues creuses.

À la lueur du diamant doré, je me remémorais mes 92 premières neiges.

Le temps semblait s'écouler de plus en plus rapidement dans mes veines.

Bien enfoncée dans mon fauteuil d'acier, j'observais mon reflet briller dans la lucarne de ma chambre.

Une tignasse terne. Des doigts noueux. Un dos vouté.

À la lisière de mon existence, je ne puis m'empêcher de regarder derrière mon épaule. Et si je pouvais un jour revivre ma vie, que ferais-je autrement ?

Si je pouvais verdoyer à nouveau, je prendrais les choses moins au sérieux.

J'oserais embrasser encore plus fougueusement les fortunes de mer, les faux pas et les folies.

Je m'efforcerais de me sustenter uniquement d'ataraxie et mangerais moins de navets.

Si la vie s'élevait devant moi, je ne laisserais pas le fugace et frêle présent s'échapper.

Illustration: Évi Jane Kay Molloy

D'un ghetto à l'autre

« My nie chcemy ratować życia. Żaden z nas żywy z tego nie wyjdzie. My chcemy ratować ludzką godność »

(« Nous ne voulons pas sauver notre vie. Personne ne sortira vivant d'ici. Nous voulons sauver la dignité humaine »).

Izrael Chaim Wilner - Ghetto de Varsovie 1943 ( poète juif)

« Mais nous souffrons d'un mal incurable qui s'appelle l'espoir. Espoir de libération et d'indépendance. Espoir d'une vie normale où nous ne serons ni héros, ni victimes. Espoir de voir nos enfants aller sans danger à l'école. Espoir pour une femme enceinte de donner naissance à un bébé vivant, dans un hôpital, et pas à un enfant mort devant un poste de contrôle militaire. Espoir que nos poètes verront la beauté de la couleur rouge dans les roses plutôt que dans le sang. Espoir que cette terre retrouvera son nom original : terre d'amour et de paix. Merci pour porter avec nous le fardeau de cet espoir. »

Mahmoud Darwich ( poète palestinien)

7841

« Avec la force comme alliée, d'autres temps, d'autres lieux tu verras ! » — Yoda

Le grand voyage vers ailleurs qu'il avait entrepris le conduirait-il au désert sans fin? L'homme solitaire marchait le long des lieux qui s'entrelaçaient dans son existence. Absorbé dans les images qui entremêlaient les réalités diffuses. Les signes des passages temporels occupaient toute sa réflexion. Étrangement, ils étaient gravés sur les jardins de son observation. Une école primaire ou les enfants couraient le long des boisés. Jeu enfantin, autobus jaune, neige, hockey et autres souvenirs.

Il eut jadis un mouvement d'euphorie dans sa vie mélangée. Un grand salon ou les festins ne semblaient pas vouloir s'arrêter. Il était déjà vieux et il savait d'avance où les parcours de ses amis carnavalesques se dirigeaient. Il voyait, il savait et pourtant l'impitoyable et affreuse marque s'affichait toujours. Le compte à rebours, l'ennemi était déjà là. Assis sur son divan en face de lui, il le regardait. C'était un si vieil ennemi que l'homme avait pris l'habitude de ne plus l'écouter. Parfois, dans sa réflexion silencieuse avec ce dernier, ses amis s'approchaient et lui demandaient si tout allait bien. Il n'avait qu'un mouvement réflexe, il se devait d'être rassurant, ils ne pourraient comprendre les mondes que sa vision ouvrait devant lui.

Le mur vert lime affichait une foire, la foule anglaise s'approchait, les canards tournaient le long de l'étang artificiel. Un enfant tentait de trouver le meilleur canard. Et puis le son des manèges qui s'activaient. Elle n'avait aucun sens dans sa vie. Et pourtant elle était là. S'approcha, lui fit une étreinte et soudain, elle disparut. Le salon s'était rempli durant son moment d'absence. La foule s'activait, la musique, le son des amusements, les alcools et les jeux. La grande roue illuminée tournait dans sa tête. La musique, les clowns et les temps s'entrelaçaient.

Il croisait son regard, un déguisement un peu trop éméché. Quelques champignons le rendaient confus. Quelques années plus tard, la vitesse de sa voiture frapperait un arbre dans une courbe, seul et isolé, la mort ferait son œuvre, mais pour l'instant il était heureux et philosophait sur le sens des choses, bien installé sur la table adjacente au baril de bière.

Il entra dans les toilettes, le passage interdit vers l'au-delà s'ouvrit, la lumière diffuse que lui offrit le puits de lumière. Tard dans la nuit, le quatre-roues roulait bien vite dans le dépotoir, les signes s'affichent sur chaque sac de vidanges. Et puis, les arbres, la forêt et dans son milieu les astres l'éblouissent. Il vit une usine délabrée, finalement entouré par des loups. Un à un, dans la lumière, ils venaient lui porter révérence. Il comprenait que non loin de lui, observant en silence, l'ennemi ne pouvait rien, l'heure n'était pas la bonne.

La musique remplit de nouveau son âme. La bouteille de vin était vide. Il sortirait bientôt de son antre. Il devait redevenir l'hôte de sa soirée, celui que l'on s'attendait de trouver, celui-là qui trouvait toujours le moyen de changer les règles du jeu. Il croisa son regard, elle cherchait ce qu'elle pensait avoir trouvé. L'homme ne pouvait pas lui dire que dans quelques années, épuisée d'essayer de remettre en marche un amour perdu depuis des lustres, elle irait se jeter dans l'épuisement de tentatives vaines pour retrouver, un seul instant, le moment qu'elle vivait ce soir.

Soudain, une voiture folle traversa le salon. Il se reconnaît. Nous sommes quelque part, plus tard, bien plus tard, pourchassés par quelques voitures non identifiées. Il traverse une banlieue sans nom, chaque voiture porte un numéro d'un jaune différent. Il roule de plus en plus vite. Les paysages se transforment et les maisons de banlieue se dissolvent. Sa voiture freine. Il abat d'un coup de feu bien précis ses ennemis et s'affale dans le divan, personne ne semble avoir vu le danger.

L'homme se leva, et regarda son corps en mouvement sur la piste de danse. La musique était beaucoup trop forte. Comme d'habitude, les moments d'absences provoquaient des doublons dans les lignes du temps. Une étrange femme fantomatique, habillée en uniforme d'ouvrière lui donna une bière et s'évapora au son du piano.

Quand il sortit de nouveau de sa torpeur, la pièce était vide, les serpentins sur le sol, l'odeur de bière lui donna envie de quitter les lieux. Il sortit, passa devant l'église, il marchait vers le parc. Il termina sa deuxième bouteille de vin sur les tables de pique-nique. Il vit soudain, un vieil homme, canne en main, s'avancer vers lui, le son de sa voix inaudible. Derrière lui, l'homme, l'adversaire, l'ennemi. Le vieil homme s'affala. Le cœur avait lâché.

Le temps horloge

Illustration allant avec le texte

Frappe,
Une seconde et il était là.
Fraction d'espace, rencontre lumineuse.
Frappe,
Une minute de retard.
Sur le long de la fenêtre se touche une larme de pluie.
Grillage du temps sur la feuille de calcul des moments.
Elle se croise, il se pousse.
Revenir en arrière s'avère impossible, le prochain rendez-vous marquera l'heure.
Glissade des mécaniques qui roulent et s'effacent.
Frappe,
Elle était là, il n'y était plus.
Tristes fleurs en main.
Il s'évanouit en un souvenir de poudre d'argent.
Frappe,
Le sifflet du train se fait entendre au loin.
Partir là-bas d'une gare à l'autre.
Et espérer quelque part peut-être entre les astres.
Frappe,
Rien n'est plus comme avant, il n'y a plus de gare, plus d'espace, plus d'attente.
Tous vont si vite, se dit-elle.
Elle marche contre le vent,
Sa chevelure grise s'évapore dans la brume du matin.
Voilà maintenant soixante ans qu'elle attend,
Mais le train ne viendra jamais, la guerre est finie.

Texte: Maxime Charbonneau
Illustration: Mélissa Pilon

Eucalyptus

Saupoudré  

D’eucalyptus emmitouflé

Dans des mitaines de vieux éternuées

L’homme aux mille regards

Se penche sur l’historique retard

Du mouvement pendule

Qui afflige le déplacement de ses courbes détendues

Origine précaire de classe laborieuse

Il ne saurait être autre chose que détonateur rieur

Huit cent douze contraintes éméchées

Le couvercle décadent explose en œuvres exposées

Sur le balcon des balbutiements

De son idéal tourmenté et dément

L’homme patient canne d’or en main

S’avance aux pas de l’oie

Et à son oreille dévoilée

Glisse des mots hautains

Des sons de bas quartiers

Des hérétiques idées

Être

Qu’il est dur d’être un homme dans ce pays.
Qu’il est dur d’être dans ce pays.
Ce soir le ciel m’aspire.
Je marche sur les étoiles.
Des fantômes s’approchent de moi.
Seul réconfort d’un soldat errant.
Que reste-t-il de moi?
Devant le vide céleste.
Ce soir je disparais dans les rues de la ville.
Que restera-t-il de moi?
De nous?

Urgence

(Animation: veuillez cliquer à l'intérieur pour activer et animer.)

Relâchement

Pousser, manger, haïr.

Paraître, s'investir et s'accrocher au fond du sac.

Sucer le socle de l'incontournable : paraître pour manger... manger... paraître.

Frissonner et languir.

Faire quelque chose pour tracer du vide. Se vider pour oublier, ne rien faire pour s'effacer, manoeuvrer pour continuer...

S'écraser à plat ventre sur un plancher... et dormir.

Île bizarre

(Animation: glisser le curseur sur l'image pour lancer.)

 

La brèche

Illustration et poème publiés par Isabelle Caron et Daryl Hubert dans le recueil Mon village: un personnage, une maison, un souvenir, une histoire. Ce projet a été réalisé dans le cadre du 30e anniversaire de la bibliothèque Gilles Vigneault et le 15e anniversaire du Journal communautaire Le Portageur de Natashquan.

 

Image et poème sur un voyage à Natashquan

Droit de s'évader dans l'âme d'un village
Où même les vagues nous appellent à coexister
À rendre visible nos mémoires, nos galets
À rendre humaine notre folie, nos voyages...

Ici, nous avons rencontré
D'un coeur à l'autre, des femmes et des hommes
Partageant l'expression d'une danse authentique, folklorique et engagée
Qui de partout, et pour ensemble, nous ont fait rêver.

Rêver d'unité, rêver de pays
Rêver d'histoire et d'infini
Rêver de vous… revoir bientôt
Rêver à cette brèche qui s'ouvre.. sur des possibles tangibles.

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Isabelle Caron, et Daryl Hubert. 2011. « La brèche ». In Mon village: un personnage, une maison, un souvenir, une histoire, p. 15-16. Le Journal Le Portageur. Natashquan.

ISBN : 978-2-9812725-0-8
Dépôt légal - Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2011
Dépôt légal - Bibliothèque et Archives Canada, 2011